Homélie pour les funérailles d’Alfred Gadenne (Luingne 16-09-17)

Homélie pour les funérailles d’Alfred Gadenne (Luingne 16-09-17)

“Les larmes des petits enfants éteignent la beauté des étoiles” nous disait si bien l’abbé Pierre (prêtre et député en France) à la fin du 20ème siècle.

Cette phrase nous parle de la marche vers la lumière des êtres brisés qui ont perdu tous leurs repères.

La première vertu d’un geste d’amour est la capacité de rejoindre l’autre pour le comprendre et l’accueillir sans porter de jugement. C’est sans doute ce qu’aurait fait aujourd’hui notre bourgmestre Alfred qui vient de nous quitter tragiquement.

Etre chrétien c’est accepter que Dieu nous communique un peu ce qu’Il est, c’est-à-dire qu’il nous communique sa capacité incroyable de nous aimer .

Aujourd’hui, le rythme effréné de la vie engendre une multitude de drames humains et nous devons découvrir le chemin d’un retour à la vie chez tout être qui marche dans les ténèbres.

Nous sommes tous invités à être, dans notre vie de chaque jour, cette petite flamme sur le parcours difficile de ceux qui ont perdu leurs repères. C’est ainsi, qu’avec un peu de patience et un brin de compétence, ensemble nous rallumerons la “beauté des étoiles”.

Oui, notre bourgmestre Alfred… vous permettrez que je l’appelle par son nom de baptême… était un chrétien vrai et entier. Tous les dimanches, il participait à l’eucharistie au Christ Roi… Il s’associait également toujours à la peine des familles en deuil depuis de nombreuses années… Le vendredi saint, il était au chemin de Croix et comme tout le monde, il portait une croix sur ses épaules… Oui Alfred a pris le risaue d’être un témoin de Jésus-Christ.

Je voudrais réfléchir avec vous en partant de l’événement qui nous réunit ce matin dans cette église autour d’Alfred Gadenne… mais également en lien profond avec tous les défunts qui quittent quotidiennement ce monde dans l’anonymat et l’oubli le plus total.

Ce que j’ai compris dans les évangiles c’est que la foi ne consiste pas d’abord à réciter le CREDO ou à participer au culte mais bien, en premier lieu, à être relié au Christ… se laisser aimer par lui et tenter de courir le risque d’aimer son prochain. Alfred a courru ce risque !

L’évangile vient de nous dire :”Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde”

Le sel et la lumière! Voilà deux mots bien inscrits dans le quotidien de nos vies de chrétiens. Dans cet évangile que nous venons d’entendre, ils ont une place primordiale! Nous sommes souvent les utilisateurs de la lumière et très souvent nous arrangeons nos préparations culinaires avec un peu de sel. Vous salez vos préparations et puis vous les goûtez. C’est important pour que les convives ne vous disent pas : “ça manque de sel!” Mais s’ils vous disent : “ce plat est vraiment délicieux!”, cela signifie que le sel a joué son rôle de révélateur. REVELATEUR… c’est le rôle de tout être humain dans sa situation familiale et professionnelle. Ce fut le rôle d’Alfred …dans sa vie de famille… dans ses activités professionnelles… dans ses responsabilités de bourgmestre et de député.

Avec le SEL, en juste dose bien évidemment, chaque aliment trouve son juste goût, et on ne pense plus au sel!!!

Le chrétien dans le monde ne doit pas brûler d’un zèle intempestif tel qu’on ne voit et n’entende que lui, ni disparaître comme s’il avait honte de sa foi et s’excuser d’être chrétien. Comme le sel met en valeur la saveur des aliments, le chrétien doit mettre en valeur l’autre, afin qu’on puisse s’écouter, s’entendre et construire ensemble un monde meilleur dans la paix.

La LUMIERE permet de découvrir les coloris et la richesse des objets qui nous entourent.

Combien d’hommes dans le monde contemporain, ont perdu la foi en même temps que les espoirs et les illusions vaines de leur enfance. Ce qu’ils appelaient “foi” n’était qu’une de leurs illusions. Ils mettaient tout leur espoir dans un sentiment de paix , de consolation, d’équilibre intérieur, de respect d’eux-mêmes.

L’évangile que nous venons d’entendre nous invite à approfondir le sens de notre existence.

Si le sel suggère l’humilité du serviteur, la lumière évoque sa révélation. “Vous êtes la lumière du monde!” dit Jésus à ses disciples. De là à se prendre pour des lumières, il n’y a pas loin! Mais la lumière n’est pas faite pour qu’on la regarde, elle est faite pour que l’on discerne le chemin. Si nous communions au Christ qui donne sa vie pour nous, nous allons rayonner de Sa Lumière. Mais celle-ci nous appelle à une conversion quotidienne. En effet, toutes les personnes qui travaillent de leurs mains le savent bien! Pour voir les défauts, les fissures ou les malfaçons d’un objet, il faut l’éclairer, et l’éclairer encore pour le réparer. La lumière du Christ révèle nos failles. Peut- être, nous préférons rester dans l’ombre! Mais si nous acceptons cette lumière, l’Esprit du Seigneur vient à notre secours pour nous “réparer” et faire de nous des témoins de son amour qui nous sauve. Alfred avait bien compris cela et à son tour, il est devenu porteur de lumière, non pour que l’autre le regarde, mais pour qu’à la lumière de son témoignage de vie, il perçoive pour lui-même toute la puissance d’amour et de pardon qui vient de Dieu.

Mais comment entrer en relation avec l’autre? Il n’est pas facile aujourd’hui de témoigner de la foi et des convictions qui nous habitent! Lorsque je veux parler à un tout-petit, à un plus fragile, je m’accroupis pour être à sa hauteur, et un dialogue peut commencer. Alfred s’est toujours mis à la hauteur des plus fragiles.

(Ecoutons le témoignage de Sébastien, neveu de notre bourgemestre)

Dans nos vies professionnelles, nous vivons très régulièrement cette rencontre entre des personnes si différentes. Pour chacun, l’autre est important. “Toute personne est une histoire sacrée.” Dans cette attention aux plus petits, une lumière jaillit, une relation s’instaure, des blessures se referment, la communauté se construit, lumineuse et pleine de louange. Elle fait briller une Espérance Nouvelle, qui donne à chacun de nous envie de marcher dans cette lumière-là : “Partage ton pain avec celui qui a faim, accueille chez toi les pauvres sans abri, couvre celui que tu verras sans vêtement, ne te dérobe pas à ton semblable. Alors ta lumière jaillira comme l’aurore!”.

Nous sommes tous appelés à être dans le quotidien de nos vies professionnelles…mais aussi de parents et de grands parents…à être le sel de la terre et la lumière de ce monde…et cela en toute humilité!

Merci Alfred de nous avoir apporté ton témoignage…sans doute imparfait… mais tu as risqué d’être sel pour ton prochain plus fragile et lumière pour que l’on discerne le chemin de l’amour.

Abbé J.-Y. Pollet

inspiré par la spirualité de

Foi et Lumière”