Cheminer vers Pâques : Chemin de Croix Sainte Famille – n°4

Source des photographies et de la vidéo de la Sainte-Famille : La Paroisse de Mouscron




1ère station : Jésus est condamné à mort
Nous t’adorons, Jésus, et nous te bénissons.

« Pilate, voulant contenter la foule, leur relâcha Barattas et il livra Jésus, après l’avoir fait flageller, pour qu’il soit crucifié. » (Marc 15, 15)

Jésus est condamné par le Sanhédrin et remis au gouverneur romain pour son exécution. Sans peur, il affronte Pilate. Il se tient debout, il regarde l’autorité en face, demandant vérité et intégrité. Dans une tentative pour l’humilier, Pilate le fait fouetter. Les soldats se moquent de lui, ils crachent sur lui. Maintenant qu’il est condamné, Jésus garde un silence absolu. La grandeur de Jésus réside dans son refus d’accepter une solution facile de sortie. Même quand il se sent abandonné par Dieu, il continue à pardonner, à croire et à espérer. N’est-ce pas cela vivre en paix ?
Aujourd’hui à travers le monde, tant de gens sont jetés en prison, torturés et même exécutés parce qu’ils osent exprimer leurs convictions et leur espérance pour un monde où la compassion et la justice de Dieu puissent régner. Nous nous souvenons d’eux et nous demandons à Dieu de leur donner la force. Nous nous rappelons de ceux qui sont en prison et sans voix, dont les besoins essentiels ne sont une préoccupation pour personne. Ils nous interpellent à vivre avec une telle dignité que nous imposions le respect même à ceux qui aimeraient nous éliminer. Nos embarras peuvent devenir aussi une occasion de nous souvenir d’eux.

Prions : Père aimant, ton cœur souffre en voyant ton Fils être traité de cette façon ! Partage-nous l’Esprit qui vit en toi pour que nos cœurs puissent aussi sentir la peine de ceux dont la dignité et la liberté sont niées. Que ta paix nous fortifie sur la route. Amen.


2ème station. Jésus est chargé de sa croix
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Ils se saisirent donc de Jésus. Portant lui-même sa croix, Jésus sortit et gagna le lieu dit du crâne, qu’en hébreu on nomme Golgotha. » (Jean 19,16b-17)

Publiquement et volontairement, Jésus prend sur lui l’instrument de son exécution. Il l’assume librement et sans rancœur. Dans un tel contexte d’horribles souffrances, son attitude de pardon est un acte d’amour, elle est aussi le pouvoir de créer la paix. Jésus s’avance et sort de lui-même pour trouver son centre en celui qui dépasse totalement sa faiblesse humaine. Il prend ainsi le risque de vivre le Mystère et son sens ultime.
Il y a plusieurs travailleurs dans les champs et les usines du monde qui accomplissent des travaux éreintants pour gagner juste ce qu’il faut pour manger et supporter leurs familles. Ce sont les travailleurs immigrants qui récoltent nos légumes, les enfants qui, avec des masses, réduisent les roches en gravier et les femmes dans les usines de textile qui confectionnent nos vêtements. Parfois ils sont intimidés, battus, violés et même tués.

Prions : Jésus notre frère, en marchant à ta suite nous parcourons le chemin de la croix vers une vie nouvelle. La croix destinée à briser ta vie devient le symbole de ton amour et de ta fidélité. Aide-nous à relever joyeusement le défi que chaque jour nous offre de vivre comme tes disciples. Donne-nous du courage quand nous trébuchons et aide-nous à persévérer. Fais que le monde voie dans nos vies une invitation à une expérience plus profonde de paix. Amen.


3ème station. Jésus tombe pour la première fois
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons

« Il était méprisé, laissé de côté par les hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, tel celui devant qui l’on cache son visage ; oui, méprisé, nous ne l’estimions nullement. En fait, ce sont nos souffrances qu’il a portées, ce sont nos douleurs qu’il a supportées… » (Isaie53, 3-4a)

Jésus atteint un point où son corps ne peut pas en porter davantage. Il atteint une limite physique qui l’écrase au sol. Et pourtant, en gisant là sur la rue, Jésus ramasse ses forces, se lève et poursuit sa marche. L’Esprit nous appelle parfois à reconnaître nos limites et à nous confier en la présence divine qui nous renouvelle pour aller de l’avant. La paix n’habite-t-elle pas sous le tourbillon qui fait rage autour de nous et en nous ? N’est-ce pas cette paix qui nous soutient dans notre vulnérabilité ?
À certains moments nous nous heurtons au mur de nos limites et de nos fragilités. Sur nos routes, nous sommes arrêtés par les circonstances et conduits jusqu’à un effondrement physique et émotionnel.

Prions : Ô Dieu, notre refuge et notre force, tu nous aides aux heures de peine. Chasse la peur même quand la terre bouge et que la tempête fait rage autour de nous. Aide ceux qui œuvrent pour la paix afin qu’ils brisent la logique de la violence par le pouvoir de l’amour. Aide-nous à transformer notre monde brisé en ton règne de paix. Amen.


4ème station. Jésus rencontre sa mère
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons

« Quant à Marie, elle retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur. » (Luc 2,19)

Jésus, pèlerin dérisoire, porte sa croix dans la solitude et la souffrance. Mais voici sa mère, son lien le plus solide avec l’humanité. Impossible de lui épargner le spectacle d’un fils défiguré, couronné d’épines, condamné à mourir injustement. Un fils qui porte les traces d’une violence inouïe. À travers le regard de sa mère, Jésus voit un cœur transpercé d’inquiétude. Il aperçoit en même temps la peur qui nous envahit : peur de souffrir seul, peur de mourir seul, peur de voir notre monde livré aux mains des exploiteurs et des marchands d’illusions. De son cœur bouleversé par cette rencontre émane le désir de nous rassembler tous dans l’immense famille des enfants de Dieu.
Nous ne sommes pas seuls. Laissons-nous apprivoiser par le regard de Jésus. Laissons-le traverser nos peurs, nos inquiétudes. Si nous consentons à lui donner l’hospitalité sur nos chemins de croix, nous trouverons la paix. Aux côtés de Marie, que viennent prendre place celles et ceux qui cherchent un refuge, une patrie, une maison de partage et d’amitié. Et nous, témoins de guerres fratricides qui privent des milliers d’êtres humains d’une vie familiale paisible, intercédons auprès du Christ, notre sauveur, pour que les chantiers de la paix succèdent aux entreprises de division. Gardons confiance car même défigurés par les blessures des séparations et de l’exil, nous sommes réunis en « celui qui est notre paix ».

Prions : Ô Jésus, nous prions pour les mères qui ne supportent plus le sang versé, les tueries et l’usage des armes, pour les familles qui perdent les leurs à la guerre. Toi, notre unique sauveur, renouvelle notre espérance pour que nous soyons, avec Marie, témoins de la vie plus forte que la mort. Amen.


5ème station. Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène qui venait de la campagne, et ils le chargèrent de la croix pour la porter derrière Jésus.» (Luc, 23, 26)

Voici Jésus, icône du Serviteur souffrant : « Ce sont nos souffrances qu’il portait, et nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérions comme puni, frappé par Dieu et humilié… Le châtiment qui nous obtient la paix est tombé sur lui et c’est par ses blessures que nous sommes guéris. » (Isaïe 53, 4-5) Un étranger, passant par là, est appelé à partager sa croix, signe odieux de l’échec apparent de sa mission de réconciliation au milieu de son peuple. Jésus, familier de la souffrance, accepte la coopération de toute personne de bonne volonté qui entreprend de parcourir avec lui l’éprouvant chemin vers la paix.
Devant une scène de violence, la fuite est trop souvent, hélas, notre premier mouvement. Nous ne reconnaissons pas spontanément dans l’humilié et l’opprimé un autre visage du Serviteur souffrant. Il ne va pas de soi non plus d’avouer que nous sommes complices, à notre insu, des injustices produites par les systèmes économiques et politiques. La solidarité tangible de Simon de Cyrène lui a valu la réputation d’être associé à la mission pacifique de Jésus de Nazareth. Au long des siècles, se sont levés des hommes et des femmes d’espérance, de généreux artisans de paix et de justice venus au secours des victimes de la violence.

Prions : Ô Jésus, serviteur souffrant, apprends-nous à savoir accompagner les personnes et les peuples qui ploient sous le fardeau de l’injustice. Apprends-nous aussi à dépasser l’individualisme et à ouvrir nos cœurs à une plus large solidarité. Amen.


6ème station. Jésus rencontre Véronique
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Quant à moi, je n’ai pas résisté et je n’ai pas reculé en arrière. J’ai tendu le dos à ceux qui me frappaient, les joues à ceux qui m’arrachaient la barbe, je n’ai pas soustrait ma face aux outrages et aux crachats. » (Isaïe 50, 5b-6)

Silence. Le cortège s’arrête. Véronique prend le risque de traverser la foule pour venir au secours d’un condamné, pas n’importe lequel : Jésus, homme de paix livré à la haine, Jésus, homme libre face aux préjugés qui tuent la réputation. En échange d’un geste de compassion, la Sainte Face humiliée porte désormais sur le monde un regard désarmé, condition de la paix entre nous.
En nous approchant du visage du condamné, apprenons à laisser fondre nos répugnances face aux blessures qui entachent notre propre humanité. Imprégnés du regard du Christ humilié nous trouverons les gestes de consolation qui apaisent les mourants, les mots qui rassemblent après des années d’éloignement. En accueillant la bienveillance du Père qui vient au-devant de nous, nous avancerons avec «l’imagination de l’amour» pour abattre les murs qui séparent les membres de la famille humaine. Nous travaillerons infatigablement pour préserver les cœurs humains de la haine, de la colère ou de la vengeance.

Prions : Ô Jésus, reflet de la bienveillance du Père, nous te prions pour celles et ceux qui souffrent dans leur corps, défigurés par la maladie, un handicap, une blessure ou un accident qui a causé l’irréparable. Que ta bonté les couvre du manteau de ta sollicitude et leur accorde la grâce d’un cœur apaisé en dépit de la souffrance. Amen.


7ème station. Jésus tombe pour la deuxième fois
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Tous ceux qui me voient, me raillent ; ils ricanent et hochent la tête. » (Psaume 22, 8)

Il est là, visage contre terre. Brisé sous le poids de la croix, mais aussi par l’incompréhension des siens, de ses concitoyens. Il est devenu vulnérable. En sa chair meurtrie, l’espérance va renaître.
Tout comme Jésus qui succombe à l’épreuve d’une longue marche, les peuples de la Terre Sainte n’en peuvent plus de souffrir les divisions, les murs de séparation. Ils aspirent à bâtir des ponts plutôt que des murs. Ils font entendre un cri, un cri d’espoir, qu’ils adressent à nos consciences et aux communautés à travers le monde. Au-delà des murs, sachons avec eux «rendre compte de l’espérance qui est en nous». (1 P 3,15)

Prions : Ô Jésus, le Christ, toi que le Père a envoyé pour tout réconcilier dans son amour, entends le cri d’espérance des peuples de la Terre Sainte. Accorde-leur la paix acquise au prix de ton sang et la joie de participer à l’essor de nouvelles relations entre leurs communautés et avec le monde. Amen.


8ème station. Jésus croise les femmes de Jérusalem
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Suivait une multitude nombreuse du peuple et de femmes qui se lamentaient et sanglotaient sur lui. Jésus se tourne vers elles et dit : Filles de Jérusalem, ne pleurez plus sur moi. Plutôt sur vous-mêmes, et sur vos enfants !» (Luc 23, 27-28)

Elles pleurent sur lui. Il les retourne à ce qu’elles ont de plus cher : leurs fils qui participent aux efforts de guerre, au contrôle des populations et aux basses besognes. Jésus, le non violent, refuse de condamner ses accusateurs d’aujourd’hui, tout comme il a refusé jadis de condamner la femme adultère. Il invite plutôt ces femmes compatissantes à transmettre aux générations futures le désir de transformer le monde en oasis de liberté et de paix.
Sur le chemin des larmes et des deuils qui parsèment nos vies, laissons le regard du Christ croiser le nôtre. Acceptons d’entendre son appel à entrer dans un vrai mouvement de compassion. Il nous associe profondément à son œuvre de libération.

Prions : Ô Jésus, si attentif à la souffrance des autres, donne-nous le courage de reprendre sans cesse le chemin de la justice et de la compassion. Amen.


9ème station. Jésus tombe pour la troisième fois
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur…devenant obéissant jusqu’à la mort… » (Philippiens 2, 7-8)

Jésus est vidé de toute son énergie. Totalement épuisé, tout son corps tremble. Son esprit est embrouillé ; il ne peut plus résister. Il s’écroule.
Il y en a pour qui la vulnérabilité est un objet constant d’agression. Ils deviennent la cible de ceux qui ne cherchent qu’à faire souffrir autrui. N’importe qui peut résister à la brutalité physique ou même au stress émotionnel. Même quand la vie inflige deux crises en même temps, l’esprit humain est capable de résister. Mais quand les crises sont nombreuses et la peine infligée systématique et persistante, la souffrance dépasse toute résistance. Les gens n’ont pas d’autre choix que de tomber. Et pourtant, même là, le dernier mot n’a pas été dit. Dans l’effondrement même, leurs vies deviennent un témoignage éloquent de la puissance de la tendresse aimante de Dieu et un cri pour la réconciliation et la paix.

Prions : Jésus, souvent tu invites tes disciples à « ne pas avoir peur ». Dans ces moments où nous sentons que nous ne pouvons pas faire un pas de plus, quand nous sommes sur le point de nous effondrer, tu nous appelles à être comme toi dans l’amour et à vivre ces moments même quand tout notre être tremble. Amen.


10ème station. Jésus est dépouillé de ses vêtements
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Je peux compter tous mes os, les gens me voient, ils me regardent ; ils partagent entre eux mes habits et tirent au sort mon vêtement. » (Psaume 22, 18-19)

Jésus est dépouillé de ses vêtements. Il fait silence : « lui qui n’a pas commis de péché et dans la bouche duquel il ne se s’est pas trouvé de mensonge » (1 Pierre 2,22). Jésus, « dépouillé de sa condition divine » demeure le serviteur audacieux de tous les humains et de tous ses disciples.
Les dépouillements commencent : ceux des vêtements, des relations familiales et sociales, des droits élémentaires de la personne humaine dans l’accès aux biens essentiels : la nourriture, l’eau, un toit, la santé. Des hommes et des femmes perdent tout et sont réduits à une nudité totale : la nudité des inégalités persistantes dans l’exercice des droits humains fondamentaux. Être exposé nu et livré à la raillerie de tous est une blessure profonde pour qui connaît les visages de l’exclusion. Être dépouillé de ses «vêtements» est plus qu’un sort individuel. Dans le monde, des populations entières subissent une dépossession et un appauvrissement connus et entretenus par des gens qui « voient et regardent » et se partagent entre eux leurs vêtements et leurs biens. Servir dans la justice et l’amour exige de la communauté chrétienne le désir et l’anticipation du jugement ultime en couvrant toute personne humaine « du manteau de la justice de Dieu » (Baruch 5,2) par des réponses inventives à leurs besoins et à leurs droits essentiels : « …j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli, nu et vous m’avez vêtu, malade et vous m’avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir. » (Matthieu 25,35-36)

Prions : Ô Dieu juste, que notre inconscience ne nous conduise jamais à dénuder qui que ce soit ni à partager des biens enlevés aux plus démunis ; que ton Esprit nous garde vigilants et nous apprenne à couvrir, dans la justice et l’amour, qui est nu et qui a besoin. Amen


11ème station. Jésus est cloué sur la croix
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Arrivé au lieu dit le Crâne, ils l’y crucifièrent ainsi que les deux malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche. Jésus disait : «Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font»…Le peuple restait là à regarder ; les chefs, eux ricanaient…Les soldats aussi se moquèrent de lui…L’un des malfaiteurs crucifiés l’insultait… » (Luc 23, 33-34.35.36.39)

Quand la violence se déchaîne, elle commence son travail et le poursuit par la tromperie et le mensonge. Stigmatiser et crucifier « les autres » à tout jamais sont des besognes répandues. Elles installent des personnes et des populations dans l’exclusion et la peur. La violence brise les corps. Elle démolit les esprits et les âmes. Elle défait les cultures. Céder à la violence et au mensonge soumet toujours à une culture de mort avec ses ricanements, ses moqueries et ses insultes.
Tant de chrétiens appartiennent à des Églises et à des familles qui ont pour croix la souffrance et la ténacité dans des conditions douloureuses. Comment développer et transmettre une culture et un héritage de pardon quand les circonstances et les événements crucifient sans arrêt par le mépris et la mort ? La proclamation de la justice et du pardon surgit souvent du cour et sur les lèvres de ceux-là mêmes qui connaissent l’abîme du pire.

Prions : Ô Dieu Saint, nous sommes souvent rivés à notre croix sans liberté de mouvement ; que ton Esprit Saint nous apprenne, dans l’abîme du cœur, le chemin et les gestes de la justice et du pardon. Amen


12ème station. Jésus meurt sur la croix
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« Après quoi, sachant que dès lors tout était achevé, pour que l’Écriture soit accomplie jusqu’au bout, Jésus dit : «J’ai soif.» Il y avait là une cruche remplie de vinaigre, on fixa une éponge imbibée de vinaigre au bout d’une branche d’hysope et on l’approcha de sa bouche. Dès qu’il eut pris le vinaigre, Jésus dit : «Tout est achevé » ; et inclinant la tête, il remit l’esprit. » Jean 19, 28-30

Jésus meurt hors de Jérusalem, ville qu’il a tant aimée ! Il meurt rejeté par les siens, considéré comme un renégat et un impur. La mort commence aussi quand l’hostilité des uns et l’urgence de sécurité pour les siens et pour soi obligent à fuir en toute hâte. À chercher des routes et des pays qui sont le lieu des déplacés et des réfugiés aux mille visages et aux mille histoires.
Quand tous les recours sont épuisés, qu’aucune porte et qu’aucune frontière n’ont pu être ouvertes, la mort n’est-elle pas le mur ultime où tout semble buter et s’achever ? Tant de réfugiés et de déplacés sont aux prises avec une vie de fortune et des expédients frustrants. Quel défi que ceux de commencer et recommencer, ailleurs et loin, avec des repères, des langages et des coutumes qui ne sont jamais les nôtres ! Le souvenir des racines et des maisons, la mémoire des villes et des familles passent et repassent dans le cœur et la mémoire comme une urgence et une fidélité à l’esprit reçu et vécu. Jésus aura été, du début jusqu’à la fin de son existence, un pèlerin et un étranger. Contraint à l’exil en Égypte dès sa naissance, il meurt hors de l’enceinte de Jérusalem dans l’exclusion. Après avoir versé tant de larmes sur Jérusalem, Jésus n’a plus rien d’autre à offrir que sa mort et son esprit. Dans le rejet, Jésus apprend aux disciples la fidélité à l’Écriture et la volonté de tout achever dans la confiance et la paix. Il remet son esprit sans trahir sa vocation ni mépriser ceux qui l’excluent.

Prions : Seigneur, que deviennent vraies pour nous les paroles des pèlerins : Pour l’amour de mes frères, de mes amis, laisse-moi dire : Paix sur toi ! Pour l’amour de la maison du Seigneur notre Dieu, je prie pour ton bonheur ! Amen. (Ps 121,8-9)


13ème station. Jésus est détaché de la croix
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

« …Un membre éminent du conseil, Joseph d’Arimathie, arriva. Il attendait lui aussi le règne de Dieu. Il eut le courage d’entrer chez Pilate pour demander le corps de Jésus. Pilate s’étonna qu’il soit déjà mort. Il fit venir le centurion et lui demanda s’il était mort depuis longtemps. Et, renseigné par le centurion, il permit à Joseph de prendre le cadavre. Après avoir acheté un linceul, Joseph descendit Jésus de la croix et l’enroula dans le linceul. » (Marc 15, 43-46)

Combien de proches cherchent ou attendent en vain des disparus sans jamais pouvoir les retracer, les reconnaître, les nommer et les tenir contre soi entre la paix de la découverte et la douleur de la vérité. Enfants disparus, victimes cachées à la hâte, corps à jamais introuvables. Que de morts silencieuses ! Que de personnes disparues et toujours à trouver ! Des régimes se construisent dans la disparition des opposants et dans un acharnement à faire disparaître les moindres traces d’existence et de mémoire.
Introuvables et effacés pour toujours ! Déni durant la vie, négation après la mort. Négation volontaire de la dignité de la personne. Que pouvaient bien recevoir entre leurs bras et sur leurs cœurs Joseph et les proches de Jésus ? Un cadavre écrit l’évangéliste comme s’il ne restait de lui qu’un mot froid. Celui que la communauté chrétienne reçoit, même défiguré, c’est une personne. Toute vie est sacrée. Rien de chaque personne ne peut être oublié ou nié même après les pires profanations et les disparitions inquiétantes. La communauté chrétienne apprend à veiller pour que tout humain soit rendu à ses proches et reconnu dans sa véritable nature.

Prions : Ô Dieu aimant, toi qui confies Jésus à des proches et à des amis, que ton Esprit appuie tout prochain qui cherche et ramène tout être humain à la présence et à la mémoire. Amen.


14ème station. Le corps de Jésus est mis au tombeau
Nous t’adorons, Jésus, nous te bénissons.

«A l’endroit où Jésus avait été crucifié il y avait un jardin, et dans ce jardin un tombeau tout neuf où jamais personne n’avait été déposé. En raison de la préparation des Juifs, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus. » (Jean 19, 41-42)

Jésus connaît le privilège de la sépulture et de la mémoire. Tant d’humains sont privés d’un repos dans la paix et d’une trace dans l’histoire. Que de tombeaux sans repère ni inscription. Que de destins sans souvenir ni trace. Que de sépultures hâtives comme s’il fallait ajouter de l’oubli à la mort.
C’est mourir plusieurs fois que d’être effacé de la mémoire des siens et des sociétés. Rendre à la mémoire tout humain et se souvenir de tout itinéraire de vie sont des défis dans un monde d’oubli et une mentalité de négation Toute personne a droit au jardin et au tombeau. Le tombeau vide nous parle d’espérance, de l’espérance qui ne déçoit pas parce qu’elle est don de l’Esprit de vie (cf. Rm 5,5).

Prions : Ô Dieu immortel, là où est déposé Jésus, là est semée la promesse de Vie, là aussi nous déposons nos attentes ; que ton Esprit nous garde disponibles à l’Espérance. Amen.