KARL-HALFDAN SCHILLING : Un converti norvégien – Partie 5

Sources : Les Pères Barnabites de Mouscron

L’abjuration


Schilling venait de connaître son chemin de Damas, moins fulgurant que celui de saint Paul, mais décisif pour son avenir. Il restait à le préparer à être reçu officiellement dans l’Église catholique. Madame Eitel ménagea une entrevue entre le peintre et l’abbé Joseph von der Burg, vicaire de Saint-Lambert. Le prêtre ne se montra nullement pressé de brûler les étapes. Il ne cacha rien au néophyte des conséquences possibles de son passage au catholicisme. La réprobation de sa famille, la censure de l’opinion publique, n’allaient-elles pas le condamner à vivre en exil et sans ressources ? À supposer qu’il pût rentrer en Norvège dans les meilleures conditions, quelles seraient, dans un pays entièrement protestant, les garanties de sa persévérance dans la foi catholique ? L’abbé comprit bientôt que rien ne détournerait le jeune homme de sa détermination. Du côté de son père, Karl-Halfdan reçut l’assurance que rien ne serait changé dans leurs relations et qu’il serait pourvu, comme par le passé, à ses besoins pécuniaires.

L’enseignement religieux donné par l’abbé von der Burg ne se limita pas à des leçons théoriques. Il tint à ce que son candidat fût initié aux activités catholiques. Dans ce but, il mit Schilling en rapport avec une sainte religieuse, Sœur Émilie, supérieure des Filles de la Croix à Düsseldorf. Auprès d’elle, le protestant perdit ses préjugés contre les couvents et s’initia aux œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle envers les pauvres et les malades. Bien des années plus tard, le Père Schilling écrira au sujet de cette religieuse : « Jamais, dans la suite de ma vie, je n’ai rencontré quelqu’un qui exerçât pareille influence sur mon âme. » Le peintre fut également introduit dans le cercle des artistes catholiques, où il rencontra plus d’un converti. Plus tard, Karl-Halfdan deviendra un membre zélé de la Conférence de Saint-Vincent-de-Paul, fondée par les artistes catholiques de Düsseldorf.

Son instruction religieuse achevée, le beau Norvégien se mantra impatient de faire le pas décisif. Son baptême ayant été reconnu valide, la cérémonie d’abjuration eut lieu le 11 novembre 1854, dans l’église Saint-Lambert. Mais le sommet de cette journée fut sa première Communion. Que de chemin parcouru depuis la Fête-Dieu récente ? Cette première rencontre intime avec Jésus-Hostie jeta le nouveau converti dans une jubilation comparable à celle du roi David devant l’Arche. Karl-Halfdan voulut passer cette journée mémorable hors de la ville, seul avec Dieu, courant, chantant, bondissant à travers la campagne. Il avait besoin de la vaste nature pour libérer le trop-plein de son cœur débordant de joie reconnaissante.