KARL-HALFDAN SCHILLING : Un converti norvégien – Partie 7

Sources : Les Pères Barnabites de Mouscron

« Ma vocation a été extraordinaire »


Ainsi s’exprimera le Père Schilling lorsque, à la veille de son ordination, il jettera un regard en arrière sur les voies imprévisibles et semées d’épreuves par lesquelles Dieu l’avait conduit jusqu’à l’honneur du sacerdoce. Il ajoutera : « J’ai bien souvent pensé à la vénérée supérieure (Sœur Émilie de Düsseldorf) qui me disait que j’étais un enfant de la Mère de Dieu, et j’ai souvent éprouvé la puissance de son intercession à laquelle je suis redevable d’être ici. »

Des circonstances apparemment fortuites orientèrent le peintre vers un état de vie supérieur à celui qu’il avait un moment envisagé. En 1860, il eut l’occasion de rencontrer par deux fois un barnabite norvégien, le Père Stub. Schilling fut vivement impressionné par cet ardent missionnaire, son compatriote. Quatre ans plus tard, il retrouvait le Père Stub comme curé de Saint-Olaf à Christiania, assisté des Pères Moro et Tondini. Les Barnabites venaient en effet de se voir confier la mission de Christiania, qui s’étendait à tout le Sud de la Norvège.

Des rapports amicaux s’établirent tout de suite entre les missionnaires barnabites et le jeune peintre, leur paroissien le plus assidu. « Dans toute la ville, témoigne le Père Tondini, il n’y avait que des éloges pour lui. Par les froids les plus rigoureux de l’hiver, il ne manquait pas de venir entendre tous les jours la sainte Messe. Il communiait souvent, avec la plus grande piété. Sa tenue à l’église, – toujours à genoux et bien droit, – eût édifié les anges eux mêmes … Il brillait au-dessus des jeunes gens de son âge par la pureté de ses mœurs. Les plus belles vertus ornaient son âme d’artiste. »

Schilling aida le Père Stub à fonder une Conférence de Saint-Vincent-de-Paul. Il fut même élu président de cette association charitable, dont il connaissait, grâce à son expérience faite à Düsseldorf, les rouages et le fonctionnement.

Une âme aussi pieuse, droite et charitable semblait trop belle pour rester dans le monde. C’était l’avis du Père Tondini. Un jour que le peintre venait lui montrer un tableau encore inachevé, destiné à une exposition de Christiania, le religieux lui dit sans ménagements : « Ce n’est pas là votre vocation. »

Cette parole frappa d’autant plus l’artiste que lui-même s’interrogeait sur sa voie. Au cours de l’été 1867, il s’en ouvrit au Père Stub. Celui-ci lui demanda d’abord s’il avait l’intention de se marier. Schilling répondit par un « non » catégorique. – « Voulez-vous vous faire religieux ? » – « Oui, fut cette fois la réponse, religieux, tout, tout entier. »

Entreprenant comme il était, soucieux aussi de recruter des ouvriers pour sa chère mission de Norvège, le Père Stub proposa à Karl-Halfdan d’entrer chez les Barnabites. Celui-ci accepta, après avoir reçu l’assentiment de son père.

Vers la fin de juin 1868, Schilling s’embarqua pour la France. Quand le bateau eût gagné la haute mer, il monta sur le pont et jeta aux vagues sa palette et ses pinceaux. Il disait adieu à son art. Il ne savait pas encore qu’il disait adieu pour toujours à sa chère patrie.

Le 2 juillet 1868, le beau Norvégien arriva à Paris et descendit au couvent des Barnabites de la rue Monsieur. Un vieil ami, le Père Tondini, l’y attendait. Ce dernier annonçait le lendemain à un confrère italien : « Hier, nous avons reçu le premier novice norvégien, du nom de Charles Schilling, un véritable ange, – je dis un ange de trente-trois ans. Arrivé à Il heures, il était encore à jeun, pour pouvoir faire la sainte communion. Je le connais intimement, ayant été son confesseur. C’est un ange descendu du ciel. »


Les cellules des Pères Barnabites